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Avocat MOUY

L'auteur du trouble anormal de voisinage peut faire l'objet d'une condamnation solidaire avec le propriétaire actuel du bien qui a créé le trouble (Cass. civ. 3 11 janvier 2023, n°21-23.014)

La Cour de cassation est venue préciser sa jurisprudence récente sur les rapports entres l'ancien propriétaire d'un bien, qui a causé le trouble anormal de voisinage, et le propriétaire actuel.

La présence de fissures dans des appartements voisins constitue un trouble anormal de voisinage

Désordre
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Par acte notarié du 2 juin 2006, M. [O] a vendu un appartement, situé au premier étage d’un immeuble, à une société Z, qui a confié la réalisation de travaux de rénovation à un professionnel, la société F.

Durant la rénovation, des cloisons ont été abattues.

L’appartement a ensuite été revendu, par acte notarié du 7 juin 2012, à M. [X].

Se plaignant de désordres par l’apparition de fissures dans son appartement situé au dessus de celui de M. [X], et donc d’un trouble anormal de voisinage, Mme [I] [J], a sollicité une expertise judiciaire, puis a assigné en indemnisation de ses préjudices.

La dépose d'une cloison comme origine du trouble anormal de voisinage

Durant les opérations d’expertise, l’expert judiciaire a relevé que la société Z avait fait démolir, dans son appartement, les cloisons des WC et de la salle de bains.

Or il est apparu que la démolition de ces cloisons constituaient l’origine des désordres de fissures constatées dans l’appartement situé au dessus.

En effet, l’Expert avait relevé que dans un ancien immeuble, des cloisons, même non porteuses, pouvaient soutenir avec le temps l’ouvrage, de sorte qu’elles devaient être considérées comme porteuses.

Dans le cadre de la procédure en indemnisation, la Cour d’appel avait retenu, conformément aux conclusions de l’Expert, une responsabilité partagée entre le propriétaire actuel, le propriétaire antérieur qui avait fait réaliser les travaux (la société Z), et la société qui les a diligentes (la société F).

Si la responsabilité du propriétaire actuel ne fait aucun débat, la responsabilité pour trouble anormal de voisinage étant de plein droit, la question de la responsabilité des sociétés Z et F faisait débat.

La responsabilité solidaire de l'ancien propriétaire, à l'origine des travaux ayant causé le trouble anormal de voisinage

Saisie sur pourvoi de l’ancien propriétaire de l’appartement, la Cour de cassation rejette le pourvoi formé contre l’arrêt d’appel.

L’ancien propriétaire estimait qu’il ne pouvait être tenu pour responsable, n’étant pas propriétaire du bien.

On rappellera en effet que la responsabilité de plein droit en matière de trouble anormal de voisinage ne vise que le propriétaire actuel du bien.

L’ancien propriétaire soutenait donc que conformément à l’article 1240 du Code civil, et la responsabilité civile délictuelle, il appartenait au demandeur de prouver une faute qui aurait été commise par l’ancien propriétaire pour justifier de sa responsabilité solidaire.

Toutefois, la Cour de cassation rejette l’argumentation de l’ancien propriétaire en rappelant que:

Le « propriétaire actuel de l’appartement du premier étage et la société Z, en tant que maître de l’ouvrage des travaux réalisés par la société F, étaient responsables in solidum des troubles excédant les inconvénients normaux de voisinage subis par Mme [I] [J]. » (Cass. civ. 3 11 janvier 2023, n°21-23.014)

Cette position est conforme à sa jurisprudence antérieure, puisqu’elle a été capable de retenir que :

« la cour d’appel a pu déduire que le trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage causé à la propriété de M. et Mme X… par l’implantation et l’édification de l’immeuble voisin de leur propriété incombait, en dépit de sa vente ultérieure à un tiers, aux seules sociétés » de construction (Cass. Civ. 2 28 mars 2013, 12-13.917)

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  • Dernière modification de la publication :6 mars 2023