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Le compromis de vente : une vente sous conditions supensive

Vous avez signé un compromis de vente et vous souhaitez vous désengager, ou votre potentiel acquéreur vous informe se désengager. C'est possible, mais sous conditions.

I. La vente est normalement parfaite dès l'échange des consentements

La vente est un contrat, par lequel un vendeur propose à la vente un bien (immobilier ou mobilier), et un acquéreur propose de l’acquérir moyennant le versement d’un certain prix.

Ce type de contrat est consensuel, c’est à dire que le contrat est valablement formé dès la rencontre des volontés, sans qu’il soit nécessaire de réaliser de quelconques formalités (contrairement aux contrats dits formels, comme les contrat de réservation de biens immobiliers à construire par exemple).

L’article 1583 du Code civil dispose que :

« Elle [la vente] est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès qu’on ait convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée ni le prix payé ».

Il est ainsi prévu que les obligations sont normalement pures et simples, c’est-à-dire qu’elles se forment immédiatement lors de la conclusion du contrat, dès l’échange des consentements, et prennent fin dès son exécution.

Toutefois, les parties peuvent apporter des exceptions à ce principe en modifiant conventionnellement le commencement ou la fin de l’obligation, au moyen de deux modalités que sont: le terme et la condition.

Le terme est un événement futur et certain dont dépend l’exigibilité d’une obligation (terme suspensif) ou son extinction (terme extinctif).

La condition quant à elle, est certes un événement futur mais cette fois incertain, dont dépend la naissance d’une obligation (condition suspensive) ou sa résolution (condition résolutoire).

II. Le compromis de vente est en réalité une vente sous condition (suspensive le plus souvent)

Pour éviter que la vente soit conclue dès la signature du contrat, le droit français autorise la signature d’acte sous condition.

C’est ainsi que le compromis de vente (ou promesse unilatérale ou synallagmatique) est né.

Cet acte juridique, de la catégorie des avant-contrats, permet ainsi de lier des parties sur un projet juridique, quand bien même toutes les conditions nécessaires à la perfection de l’acte, ne seraient pas encore réunies.

En matière de vente immobilière, de nombreuses règlementations sont venues encadrer cette opération (réalisation des diagnostics, délai de réflexion, etc…).

Par ailleurs, très souvent les acquéreurs n’acquièrent un tel bien que par le biais d’un prêt dont l’octroi ne pourra être accordé par l’organisme bancaire, qu’après étude du dossier.

Ils peuvent aussi envisager l’achat d’une parcelle à construire, et ont ainsi besoin l’assurance de voir leur projet de construction être réalisé.

Pour garantir les droits et le projet des acquéreurs, les compromis sous conditions suspensives sont alors rédigés.

Selon l’article 1304, alinéa 2 du Code civil, « la condition est suspensive lorsque son accomplissement rend l’obligation pure et simple ».

Ainsi, l’accomplissement de la condition suspensive rend alors parfaite la vente.

 Par ailleurs, il est rappelé que « L’obligation est conditionnelle lorsqu’elle dépend d’un événement futur et incertain.La condition est suspensive lorsque son accomplissement rend l’obligation pure et simple.Elle est résolutoire lorsque son accomplissement entraîne l’anéantissement de l’obligation. » (article 1304 du Code civil).

La condition suspensive doit être future et incertaine, mais surtout doit être indépendante de la seule volonté des parties pour ne pas être requalifiée de potestative (et être alors réputée non écrite).

Ainsi, elle ne peut dépendre de la seule volonté de l’une des parties.

III. La vente sous condition suspensive d'obtention d'un permis de construire positif

Comme il a été évoqué précédemment, de nombreux compromis de vente sont établis sous la condition suspensive d’obtenir d’un permis de construire.

En effet, ce genre de condition est courante pour les acquisitions de parcelle.

Mais attention à la rédaction de ce type de clause. Il faut prévoir un permis positif purgé de tout recours.

Si cette condition n’est pas réalisée, alors le compromis de vente devient caduc.

Mai que se passe-t-il si aucune demande de permis de construire n’est déposé par l’acquéreur? 

C’est l’article 1304-3 du Code civil qui tranche cette hypothèse en prévoyant que « la condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l’accomplissement ». 

Il est ainsi admis que si le permis de construire n’est pas déposé par le bénéficiaire de la promesse de vente, alors qu’il s’y était engagé, la condition suspensive est considérée comme remplie et ne peut dès lors surseoir à la formation du contrat.

Il en va de même si un tiers au promettant a déposé le permis de construire et ne l’a pas obtenu, la Cour de cassation indiquant qu’il appartenait au promettant lui-même qu’il s’y était engagé aux termes de l’acte de le déposer, alors qu’il ne l’a pas fait de sorte que la condition suspensive a défailli par sa faute :

« la cour d’appel a pu en déduire que la société Foncinvest ne pouvait, au vu de ces éléments, soutenir que la condition suspensive aurait défailli sans faute de sa part alors que, s’étant engagée à déposer une demande de permis de construire avant le 31 octobre 2007, elle n’établissait pas avoir déposé cette demande, de sorte que la condition suspensive avait défailli de son fait ; » (Cass. 7 novembre 2019).

IV. La vente sous condition suspensive d'obtention d'un prêt immobilier

L’autre grande catégorie de condition suspensive dans les ventes immobilières, reste l’obtention d’un prêt pour l’acquisition.

Mais attention à la rédaction de ce type de clause là encore, et au process qui est établi.

Bien souvent, le compromis de vente sous condition suspensive d’obtention d’un prêt impose à l’acheteur :

  • de produire deux refus bancaires;
  • dans un certain délai;
  • à un montant déterminé;
  • pour une durée d’emprunt définie;
  • à un taux maximal d’emprunt;

Ce n’est que si ces conditions (posées par la condition elle-même) ne sont pas réalisées, que le compromis pourra être déclaré caduc et permettre ainsi à l’acheteur d’être désengagé, sans frais.

Ainsi, ne peut valablement se désengager du compromis, l’acheteur qui demande un prêt non conforme aux exigences de la promesse, ou lorsqu’il ne le demande pas dans le délai imparti par celle-ci (Cass. 3e civ. 11-1-2005).

Il a déjà été jugé que ne peut valablement se désengager de la promesse :

  • L’acheteur qui demande un prêt d’un montant plus élevé que celui prévu par la promesse (Cass. 3e civ. 24-6-1998)
  • L’acheteur qui ne présente qu’un refus de prêt (alors que la promesse en exigeait deux);

Pour justifier de la non-réalisation de la condition, il faut donc bien respecter les demandes de prêt (et donc en amont, lors de la rédaction de la promesse, s’assurer que la rédaction de la condition est conforme au prêt que l’on souhaite souscrire).

IV. Le sort de l'indemnité d'immobilisation

Lors de la signature d’un compromis de vente, une indemnité d’immobilisation est versée par l’acquéreur entre les mains du professionnel ayant rédigé l’acte (Notaires, agent immobilier, avocat, etc…).

Cette indemnité d’immobilisation n’est ni plu ni moins qu’une somme d’argent que doit le bénéficiaire d’une promesse de vente (l’acquéreur) au vendeur, s’il n’achète pas le bien immobilier alors que toutes les conditions suspensives ont été réalisées.

Ainsi, si celles-ci ont été réalisées, ou ne l’ont pas été par la faute de l’acquéreur, alors cette indemnité est due au vendeur qui peut la percevoir.

Si les conditions n’ont pu être réalisées malgré les démarches loyales de l’acquéreur et conformes au compromis de vente, alors cette indemnité doit lui être restituée.

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  • Dernière modification de la publication :9 février 2023